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Laïcité, la mal-aimée

20.09.2023

Laïcité, la mal-aimée

La laïcité est de plus en plus attaquée et bafouée ouvertement. Ceci est sous aucun doute la conséquence de l’existence de systèmes tolérants se cachant derrière une pseudo-neutralité éthique et fonctionnant selon des logiques bien accommodantes.

Le pluralisme religieux en est une forme, mais, comme en Espagne ou en Italie, il en résulte que la religion majoritaire reste favorisée et mise en avant pour des raisons politiques.

La laïcité libérale pluraliste qui existe en Amérique du Nord suit une logique très particulière qui protège les religions avant même les citoyens.

L’on constate que la tendance au niveau mondial est la pratique d’un mélange entre pragmatisme accommodant et multiculturalisme dont on espère une harmonisation dans l’intérêt général de la société. Cette politique de compromis est la solution de la facilité, incapable de résoudre les nombreux défis qui en découlent.

En scrutant les différents systèmes de soi-disant compromis, l’on constate que la religion est partie gagnante. Prenons le Royaume-Uni où les écoles publiques sont ou bien laïques ou confessionnelles. L’anglicanisme est religion d’Etat et le monarque est le chef de l’Eglise. De nos jours 20 % des écoles secondaires publiques les plus performantes sont catholiques et        70 % des élèves le sont également et leurs parents sont passés au crible moyennant un formulaire dans lequel ils indiquent leur assiduité à l’église (nom et endroit de l’église fréquentée). Une « neutralité » à l’école « à l’anglaise ».

L’égalité des cultes occupe plus les dirigeants politiques que la défense de la laïcité. L’Allemagne fonctionne selon le modèle de la tolérance et du pragmatisme en pratiquant une politique basée et déterminée par l’impôt. La « Kirchensteuer » est prélevée par les « Länder ». Seuls les croyants se disant membre d’une communauté religieuse reconnue payent cet impôt. L’islam n’est toujours pas reconnu. Une tolérance et un pragmatisme pour le moins tendancieux qui ne peuvent cacher son penchant chrétien (protestant, catholique, luthérien, etc.). 55 % des Allemands se déclarent être chrétiens. Les « sans religion », bien que représentant 38 % de la population, ne comptent pour rien !

L’Espagne pratique la laïcité plurielle, c’est-à-dire « aucune confession n’aura de caractère étatique ». De prime abord cela semble bien neutre, mais vu que les politiques tiennent compte des croyances religieuses de la société, il est donc logique que les pouvoirs publics entretiennent des relations de coopération avec l’Eglise catholique et les autres confessions. Cette formulation plus qu’ambiguë permet à l’Eglise catholique de profiter du système de subventions, basé sur le fait que « chaque contribuable peut en effet choisir de verser 0,7 % de ses revenus à certaines cause … », or seule l’Eglise catholique en est une depuis les accords avec le Saint Siège en 1979. Un financement pour la bonne cause « à l’espagnole ».

Israël est le comble de la contradiction. L’Etat n’est un Etat religieux sans pourtant être laïque. Une définition trompe-l’œil vu que la religion y a une densité dépassant la notion de confession. Nul n’est obligé d’être religieux, mais le fait est que c’est un Etat qui ne fonctionne qu’avec des partis politiques religieux. Ce qui fait que la majorité des lois sont d’inspiration religieuse. Une loi votée par un parlement démocratiquement élue vaut pour tout le monde. Une notion de laïcité digne des tribus du Vieux Testament !

En conclusion on peut dire qu’il est manifeste que les Etats ont intérêt à ne pas trop laïciser la société, car l’on risque de perdre le contrôle, les religions restent le meilleur moyen de manipulation sociétale. Il s’agit de s’en servir avec doigté, voilà l’astuce.

Le droit des non-croyants dans tout cela ne semble jouer aucun rôle et peut ainsi être bafoué « en toute légalité » !

Edouard Kutten